Se libérer de sa charge mentale, pourquoi est-ce si difficile ?

a. Les croyances

Que diriez-vous à votre meilleure amie si elle vous racontait ce que, vous, vous êtes en train de dire, à savoir : « je suis fatiguée. Je dors mal. J’ai une surcharge de travail qui dure depuis des mois. Tout m’ennuie, m’indiffère ou m’irrite. Je fais tout en mode automatique. Même les vacances ne m’ont pas reposées… » ?

Très certainement pas « hardi, petit !  Ça va passer, botte-toi le c… !».

Plutôt quelque chose comme : « Tu as vu un médecin ? Si tu veux je te passe le numéro du mien, il m’a trop bien aidé… », non ?

Qu’est-ce qui fait que vous proposez des solutions si radicalement différentes à deux êtres humains qui présentent les mêmes souffrances ?

  • A l’une : de l’empathie, du soutien, une proposition de repos, des adresses de pro pour aider, …
  • A l’autre, celui que vous vous infligez : la non prise en compte des signes de détresse physiques et psychiques. Le refus de demander de l’aide ou même d’en parler à son partenaire. Voire le redoublement des efforts pour compenser le sentiment d’inefficacité.

> Le regard que vous portez sur eux.

Autant votre amie est un être merveilleux, intelligent et qui a droit à toute votre attention. Autant « je » est une personne qui doit « faire des efforts », « faire plaisir » pour avoir droit à de l’attention et de l’amour.

Vous portez en vous la croyance que vous aurez le droit à de la reconnaissance, de l’amour, de l’attention quand vous aurez fait tout ce que l’on attend de vous. Quelle que soit la façon dont vous vous formulez cette croyance.

b. La fabrique des croyances

Tout au long de notre vie, nous formons des croyances sur nous, sur les autres, sur le monde qui nous entoure.

Les croyances sont un processus mental expérimenté par une personne qui adhère à une hypothèse qu’elle considère comme la vérité, indépendamment des faits (par exemple : « les hommes sont de grands enfants »).

Le rôle des croyances est de simplifier un monde complexe, pour permettre une décision dans les conduites à tenir. « L’argent ne se trouve pas sous les sabots d’un cheval » : il faut travailler dur si on veut vivre bien. Et ces croyances sont d’autant plus actives chez nous que les facteurs contraignants sont importants et nombreux.

Les croyances sont formées par transmission ou suite à un évènement particulier.

Je vois ma mère se dévouer pour toute la famille. J’acquiers la croyance que pour être aimée, il faut que je fasse comme elle. Je me comporte ensuite de façon à « coller » à cette croyance. J’évite ou j’oublie toutes les situations où cette croyance est fausse. Et je ressens, quand je me comporte conformément à cette croyance, que les autres m’aiment mieux. Le cercle croyance, émotion, comportement, évènement se renforce logiquement.

c. Et leur côté sombre…

La face cachée de ces croyances est qu’elles nous empêchent d’accéder à la réalité. Et, aussi, à nos propres besoins.

Pour quoi les femmes sont plus souvent victimes de leurs croyances ?

Les femmes ont des croyances qui les poussent à mettre de côté leurs besoins et à tourner leur attention vers les autres. C’est la place qui leur est assignée. Et celle qui leur est transmise par la parole et les comportements de leur environnement parental et éducatif. Prendre soin des enfants, s’occuper du bien-être des personnes de la maison, en premier lieu le compagnon, le mari, satisfaire à des critères de bon accueil (rangement et propreté de la maison, bonne éducation des enfants).

Ma croyance, c’est que je serai quelqu’un de valeur si je suis reconnue comme « une bonne mère », c’est-à-dire quelqu’un qui fait passer ses enfants avant toute chose…

Vous le voyez le piège, là ?

Rechercher l’approbation, l’évaluation de notre valeur par le regard des autres, c’est un puits sans fond à remplir… Et le chemin vers l’épuisement et la dévalorisation de soi.

Traiter la charge mentale dans le couple à la racine

Pour en revenir à la charge mentale dans le couple. Au-delà d’une revendication féministe pour trouver une meilleure répartition des tâches domestiques et parentales, et de la question de l’équité entre hommes et femmes : il en va de la santé psychique et physique de ces femmes qui s’investissent sur tous les fronts.

 » Une jeune femme me confiait que, lorsqu’elle avait rencontré son compagnon, elle était très investie dans son travail, et qu’elle était une maniaque du ménage (selon ses propres mots).

A l’arrivée de leur premier enfant, elle a vite été dépassée. Et…. Elle s’est mise à développer une énorme colère contre son mari. Colère qu’elle n’arrivait pas à exprimer. Elle s’est mise à faire beaucoup de sport. A maigrir. Trop !

Quand enfin, réunis avec un tiers bienveillant, elle a pu dire : « je te déteste, tu m’obliges à faire le ménage et à être parfaite avec le bébé ! ». 

Grande surprise pour elle : sa réponse à lui a été : « j’apprécie quand tu as fait le ménage à fond, c’est tellement agréable. En même temps, si ça n’est pas comme ça tous les jours, ça me va. Ça n’a rien d’important pour moi si la maison n’est pas impeccable chaque jour. Nous n’avons pas à vivre dans une maison de magazine.

Surtout si cela te coûte ta santé et ta joie de vivre. » « 

Ce premier échange a permis de mettre le doigt sur la façon dont elle se percevait. Sur ce qu’elle CROYAIT qu’elle se devait d’être : une mère, une épouse, une femme d’intérieur et une professionnelle parfaite. 

Cette découverte n’a été que le début d’une évolution pour elle. Et pour lui de saisir ce qu’est réellement la double journée de la femme. Le début d’une réorganisation de leur relation, de leur vie de couple (et de la répartition des tâches ménagères et parentales).

Libérée, délivrée… à quoi s’attendre ?

Si je propose de traiter la charge mentale  dans le couple par un échange approfondi, c’est parce que j’ai la conviction que le couple n’est pas tenu, à l’intérieur de sa maison, d’être en conformité avec les attentes de la société. Il peut rediscuter de ce qu’est leur projet de vie commune en y mettant de la conscience.

Si le couple fonctionne de façon traditionnelle et que la femme a un travail équivalent à celui de son partenaire. Si l’organisation actuelle a amené l’un des deux partenaires à être en souffrance. C’est que la charge n’est objectivement pas équitable entre les partenaires.

Il est légitime de demander à revoir le « contrat de couple ».

Il ne s’agit pas là de « demander » aux hommes de « donner un coup de main ». Il s’agit de trouver, dans un compromis qui tient compte des intérêts et compétences de chacun. Une répartition des tâches qui intègre la prise de responsabilité de celles-ci.

Vous ne voulez pas d’un exécutant de plus, n’est-ce pas?

Vous avez besoin que la personne qui va prendre le relai prenne aussi la responsabilité des tâches domestiques y compris en pensant à la planifier et à l’effectuer.

Vous pensez que vous ne pouvez pas demander cela à votre conjoint ?

Vous seriez surprise. Dans les couples, lorsque cette discussion sur la répartition des tâches ménagères a lieu de façon ouverte et approfondie, elle permet aux pères de comprendre matériellement le temps consacré par leurs femmes à ces tâches. Ils comprennent alors à quel point leur compagne est en surcharge mentale. Qu’il ne s’agit plus de se voir déléguer et d’effectuer des tâches ménagères. Il s’agit de prévoir, dans un emploi du temps contraint par les activités professionnelles, toute la charge de travail liée à la parentalité, en plus de celle liée au logement.

Sans aller jusqu’à être tenté par l’aventure d’homme au foyer, certains choisissent d’alléger la charge de travail de leur compagne en diminuant ou réorganisant leur activité professionnelle pour être plus présent. Par exemple à l’arrivée d’un enfant. Ils font ce choix quand ils touchent du doigt la question égalitaire entre les sexes. Quand ils conçoivent que s’occuper des enfants n’est pas une tâche dégradante. Qu’elle peut même avoir son lot de satisfactions.

Ces hommes appréhendent également comment la charge mentale de leur compagne, ou la leur s’ils basculent les rôles de façon radicale, peut venir impacter le désir et la sexualité.

Charge mentale dans le couple

Quand doit-on consulter au sujet de la charge mentale de couple ? 

La réponse peut difficilement être générique. 

Certaines personnes iront chercher de l’aide dès qu’elles sentent qu’elles ne sont plus en accord avec ce qui se passe dans leur vie. Elles vont vouloir comprendre pourquoi entre les efforts qu’elles font pour aller vers ce qu’elles veulent et ce qu’elles obtiennent il y a autant de décalage. C’est une façon de faire qui permet de rester maître de son destin en tout temps. Et qui demande une grande conscience de ses responsabilités individuelles dans ce qui arrive.

D’autres attendront d’avoir dépassé toutes les limites. D’avoir atteint un état d’épuisement, pour prendre le problème à bras le corps. Si c’est une façon de faire respectable (les personnes qui font ce choix pensent ne pas avoir les ressources de faire autrement, ont la croyance que c’est normal pour elles de vivre cela, qu’elles le méritent), elle a un coût relationnel, physique, psychique, et souvent financier, non négligeable.

Le coût de l’atteinte de la santé mentale, d’un burn out, d’un divorce, d’une dépression, de maux physiques persistants, …

Comme à ma meilleure amie, je dirai : si tu es en souffrance, en état d’épuisement, n’attends pas que cela passe avec le temps : demande de l’aide à des personnes compétentes

Et si vous voulez savoir ce qu’il se passe dans les séances, vous pouvez lire: « Je ne l’aime plus mais je n’arrive pas à le quitter » ou les témoignages